La bataille pour reprendre Mossoul à l’organisation État Islamique a commencé. Pour les dizaines de milliers de chrétiens qui ont dû quitter précipitamment la ville dans la nuit du 9 au 10 juin 2014, c’est le signal d’une libération espérée et aujourd’hui attendue. Pour autant, la question du retour n’est pas si simple.

Crainte de revoir les anciens voisins

Rajih*, un chrétien d’une trentaine d’années se souvient des relations avec ses amis musulmans peu à peu rongées par la montée de l’extrémisme islamique : « Enfants, on jouait et mangeait ensemble. Mais vers 16 ou 17 ans, certains ont changé, influencés par les prédications à la mosquée. À partir de là, il y a eu une brèche entre nous. »

Suha a écrit un livre sur le christianisme en Irak. Chrétienne elle aussi, elle éprouve un sentiment mitigé : « Chacun se réjouit de la prochaine libération de Mossoul. Pourtant, je suis préoccupée par la population musulmane. L’extrémisme s’est répandu en réaction à l’expansionnisme kurde. Ce n’est pas bon pour l’unité de l’Irak. On peut s’attendre à de gros ennuis. »

Khalil, qui coordonne l’aide à 500 familles réfugiées en Jordanie, est catégorique : « L’esprit de l’État Islamique a imprégné le cœur de tant de gens… Sans sécurité garantie, personne ne retournera à Mossoul, sauf le temps de vendre sa maison. »

« D’abord, j’entrerai dans l’église »

Depuis la reprise des villes de Qaraqosh et Bartella par les forces de coalition qui se rapprochent de Mossoul, l’optimisme est de mise pour le prêtre chaldéen Ammar : « Nous espérons bientôt retrouver nos maisons. » Poulos, un autre prêtre, est plus mesuré : « Nos habitations pourraient être minées. Une fois Mossoul et les villages alentours libérés, il faudra peut-être plusieurs mois avant d’y faire une visite de reconnaissance. D’abord, j’entrerai dans l’église pour prier… si elle n’est pas trop endommagée. Ensuite je verrai ce qu’il faut reconstruire.