Très vite, Ko Aung n’a plus eu accès à certaines applications qu'il utilisait pour servir les chrétiens birmans: «Un jour, je me suis rendu compte que l'une de mes applications bancaires mobiles, appelée KPay, avait été bloquée», raconte-t-il. Les soucis de Ko Aung avec les banques n’ont cessé de s’accumuler et de s’amplifier: «Bientôt, tous mes services bancaires mobiles ont été bloqués. Je ne pouvais plus effectuer de transactions financières via ces applications, ni retirer de l'argent ou en recevoir de ma banque», explique-t-il. «J'ai ensuite essayé d'ouvrir un nouveau compte bancaire, mais le personnel de la banque m'a dit que ce n'était pas possible, car ma carte d'enregistrement nationale avait été signalée.»

Plus que de simples soucis bancaires

Mais les soucis de Ko Aung ont vite dépassé le cadre de simples problèmes bancaires. Il explique: 

«Les militaires considèrent généralement les chrétiens comme des ennemis, car ils vivent souvent dans les zones tenues par les milices rebelles.»

C'est ce qui a rendu dangereux le travail de Ko Aung avec les chrétiens: «Avant le coup d'État militaire, le fait que j'aide les chrétiens n'aurait pas été un gros problème, mais les choses ont changé», précise-t-il. «Mes fréquents voyages dans les zones tenues par les milices et où vivent de nombreux chrétiens pour distribuer de l'aide, ont été perçus avec méfiance par les militaires.»

Ko Aung se souvient de cette époque où il a commencé à vivre dans une peur constante: chaque fois que les militaires venaient camper près de son village, il devait courir se cacher dans la jungle. La situation était devenue si risquée pour lui, que d'autres partenaires de Portes Ouvertes au Myanmar ont dû l'aider à s'enfuir vers un autre pays, plus sûr.

Un contrôle technologique omniprésent

Aujourd'hui, Ko Aung tente de se faire une nouvelle vie dans un nouveau pays, loin de sa maison et de sa famille. Mais même là-bas, Ko Aung n’est pas complètement hors de danger. Il avoue: 

«Si je suis arrêté ici pour quelque raison que ce soit, je peux être expulsé vers le Myanmar.»

C’est pourquoi il s’efforce de ne pas utiliser d'informations traçables sur les médias sociaux et doit garder secrète sa localisation. Malgré tout, Ko Aung a pu rester en contact avec sa famille et ses amis au Myanmar. Mais en raison des capacités technologiques croissantes de la junte militaire, même les méthodes de communication les plus simples peuvent s'avérer dangereuses: 

«Si mes frères et sœurs du village me contactent, les militaires pourraient le savoir, car ils vérifient très souvent les téléphones des citoyens.»

En outre, la junte a interdit les sites de médias sociaux tels que Facebook et Twitter et a rendu l'utilisation d'un VPN (réseau privé virtuel) impossible. Les capacités technologiques du gouvernement ne se limitent pas à internet: «Les Birmans ont peur de commenter des questions politiques par téléphone», explique Ko Aung. Il précise: 

«Les gens craignent que les militaires ne surveillent leurs conversations téléphoniques.»

Ko Aung sait que la persécution numérique au Myanmar va probablement continuer à s’intensifier. D'autant plus que la junte militaire a fait d'importants achats à la Chine, qui se spécialise dans les technologies de surveillance: «Dans les grandes villes, on peut voir beaucoup de nouvelles caméras, constate-t-il. Les autorités essaient d'adopter le projet de ville intelligente initié par la Chine avec un système de reconnaissance faciale. Elles peuvent obtenir de l'aide de la Chine en matière d'infrastructures, de technologies et même de techniciens!»

Ko Aung rêve pourtant de retourner dans son pays: «Il y a plusieurs endroits au Myanmar où les églises sont brûlées et où les croyants doivent courir et se cacher dans la jungle. De nombreuses personnes ont été tuées. Merci de continuer à prier pour la sécurité des chrétiens birmans qui sont si vulnérables!», conclut-il.

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