En août, les prêtres, les pasteurs et les responsables d'église ont été convoqués par la police de Raipur et l'administration du district. Les consignes données sont sans appel: les services religieux et les réunions de prières ne peuvent désormais se tenir que dans des églises reconnues et enregistrées. Les chrétiens dénoncent une remise en cause de la liberté de religion qui permet de «manifester sa religion ou sa conviction seul ou en commun, tant en public qu'en privé, par l'enseignement, les pratiques, le culte et l'accomplissement des rites» (Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, article 19).

Fermetures forcées et influence de la loi anticonversion

L'administration explique sa décision en raison de plaintes reçues suite à des conversions religieuses, et parce qu’elle craint des tensions communautaires et des violences. Elle précise que tout événement religieux ou social doit désormais faire l’objet d’une demande d’autorisation.

Dans la foulée de cette décision, plusieurs églises de maison (réunions chrétiennes dans des lieux privés) ont été fermées de force et des chrétiens ont été empêchés de se réunir pour prier. Ces derniers ont témoigné ne pas avoir reçu d'information écrite détaillant l'interdiction qui s'impose à eux. En revanche, ils ont été oralement menacé par l'administration et la police de conséquence sévères, notamment de détention.

Le contexte de la loi anticonversion de l'État de Chhattisgarh est tel que des extrémistes hindous attaquent les réunions de prières, au prétexte que des personnes y seraient de force converties au christianisme.

Les chrétiens en appellent à la Constitution

La communauté chrétienne de Chhattisgarh a vivement protesté, affirmant que les églises de maison ne constituent pas une nouvelle tradition, mais une pratique religieuse mondialement reconnue. Dans de nombreuses régions rurales qui ne comptent pas d'église, les chrétiens se retrouvent dans des lieux privés pour prier et lire la Bible - des rassemblements absolument pacifiques. 

Les chrétiens affirment donc que cette décision viole la liberté religieuse telle que défendue par la Constitution de l'Inde. Ils font appel de la décision devant les tribunaux, et demandent à l'administration une enquête équitable sur les accusations de conversions forcées qu'ils réfutent. 

Un danger pour la démocratie

Pour les défenseurs des Droits de l'Homme, ce sont les principes fondamentaux de la démocratie et de la Constitution qui sont battus en brèche quand le plein exercice de la liberté religieuse est limité suite à des accusations sans preuve. 

Kunal Mishra (pseudonyme), partenaire local de Portes Ouvertes, explique: 

«L'interdiction des églises de maison a semé la peur et restreint la liberté religieuse des individus».

«Les rassemblements privés sont désormais remis en question, ce qui pourrait remettre en cause la Constitution indienne. En théorie, les articles 25 à 28 garantissent aux citoyens le droit fondamental à la liberté de religion, y compris la possibilité de gérer leurs propres affaires religieuses et de créer des institutions religieuses, telles que des lieux de culte, sous réserve du respect de l'ordre public, de la santé et de la moralité. Les chrétiens du Chhattisgarh sont victimes de l'animosité religieuse du gouvernement hindouiste et des extrémistes religieux.»

Le verdict des tribunaux sera une indication de la trajectoire que prend l'Inde en termes de liberté religieuse.