Asia Bibi s'est adressée pour la première fois à la presse depuis son arrivée au Canada il y a 4 mois. Elle évoque, dans une interview au journal britannique The Telegraph, la loi sur le blasphème qui a failli lui coûter la vie.

«Cette loi sur le blasphème doit être révisée»

Elle déclare: «Le fait qu'au Pakistan, on puisse accuser et condamner quelqu’un pour blasphème sans avoir mené d’investigations sérieuses au préalable, sans disposer de preuves fiables, ne devrait pas être possible. Cette loi sur le blasphème doit être révisée. Elle doit être assortie d’un mécanisme sérieux d’investigation. On ne devrait pas considérer qu’une personne est coupable s’il n’y a pas de preuves concrètes.»

Dans l’interview, elle raconte la terrible épreuve de la prison et sa tristesse de n’avoir pas pu revoir son père avant de quitter le pays. Si à présent, elle est en sécurité, elle n’oublie pas ceux qui sont toujours en prison à cause de cette loi:

«De nombreuses autres personnes sont en prison depuis des années, faussement accusées de blasphème, elles aussi méritent de recevoir un jugement équitable.»

Elle a refusé de renier sa foi en échange d'une libération immédiate

À cause de cette loi, Asia a passé 9 ans en prison avant que la Cour suprême du Pakistan ne finisse par l’acquitter il y a presque 1 ans. Elle a ensuite été placée sous protection policière pendant 7 mois avant de pouvoir rejoindre sa famille qui l’attendait au Canada.

Jan Figel, premier envoyé spécial de l’Union Européenne pour la liberté de religion et de conviction dont le rôle de médiateur a participé à son extradition, l’a décrite au Telegraph comme étant «une femme admirable de courage et une mère aimante qui a refusé de renier sa foi chrétienne en échange d’une liberté immédiate.»

Asia Bibi vit désormais dans un endroit tenu secret au Canada. Elle espère pouvoir déménager en Europe dans les prochains mois. La chrétienne pakistanaise a passé des années dans le couloir de la mort après une fausse accusation de blasphème.

La loi anti-blasphème touche de nombreux chrétiens

Au Pakistan, la minorité chrétienne, fortement discriminée, est particulièrement touchée par la loi anti-blasphème, souvent utilisée de manière injuste entre voisins pour régler des conflits mineurs. Les chiffres sont parlants. Au Pakistan, les chrétiens représentent environ 4% de la population totale, mais 12% des 691 cas de blasphème enregistrés en 2015 impliquent des chrétiens.

La violence exercée contre les chrétiens au Pakistan est extrême depuis plusieurs années. En 2018, par exemple, au moins 28 d’entre eux y ont été tués en raison de leur foi, 56 chrétiens sont actuellement emprisonnés et 28 églises ont été détruites.