Le 3 mai dernier, pendant que les explosions et les cris de protestation résonnaient dans les rues de l'État du Manipur (Nord-Est de l'Inde), Ritika (pseudonyme) savait qu'il était temps de partir. Sa maison était en flammes et elle a jeté un dernier coup d'œil à son logement qui était sur le point de s'effondrer. Puis elle est sortie et a marché aussi vite que son ventre de femme enceinte le lui permettait.

«Je n'ai pensé qu'à mon bébé»

«Nous n'étions pas préparés à de telles attaques», explique Ritika, qui se trouve maintenant dans un camp de réfugiés. Elle précise: «J'ai vu ma maison brûler sous mes yeux, c'était une scène terrible.» Mais il y avait plus important pour elle: «Je n'ai pensé qu'à mon bébé et je me suis enfuie», raconte Ritika. «En chemin, j'ai ressenti des douleurs et les femmes qui étaient avec moi m'ont aidée à accoucher.» Des hommes, qui avaient fui eux aussi dans la montagne, ont préparé un lit en bambou. Ils montaient la garde pendant que les femmes aidaient Ritika à accoucher. 

Se réjouir dans l'épreuve

La jeune maman poursuit: «Après l'accouchement, ils nous ont transportés, mon bébé et moi, sur le même lit de bambou.» Elle se réjouit dans l’épreuve:

«Je remercie Dieu pour la vie qu'il donne dans ce monde, même dans une situation aussi terrible. Dieu a protégé mon bébé et ma vie.»

La jeune maman se trouve toujours dans une situation périlleuse. Elle doit partager sa nourriture, son abri et de rares ressources avec d'autres personnes déplacées. Mais Ritika est optimiste quant à l'avenir de son précieux bébé: «Je prie pour mon enfant et je veux qu'il vive et qu'il voie comment Dieu peut faire de grandes choses dans sa vie», conclut-elle.

Des violences ethnoreligieuses

Les flammes qui ont englouti la maison de Ritika s'inscrivent dans le cadre des violences ethnoreligieuses qui ont débuté le 3 mai et qui embrasent le Manipur depuis plus de deux mois. Au 25 juin 2023, plus de 50.000 chrétiens de la tribu Kuki-Zo-Mizo et de la communauté Meitei ont été déplacés. Environ 400 églises ont été brûlées et détruites. Plus de 250 villages ont été incendiés et 120 morts sont à déplorer.

Ritika fait partie de la tribu chrétienne Kuki, qui a subi la plupart des destructions causées par les groupes extrémistes Arambai Tenggol et Meitei Leepun. Mais les convertis de la communauté Meitei, majoritairement hindoue, ont également fait l'objet de menaces de la part de ces radicaux. Ils ont été contraints de se reconvertir à l'hindouisme. 

À lire aussi
Inde: comprendre les violences au Manipur

Des dizaines de morts, des milliers de bâtiments incendiés et des dizaines de milliers de déplacés internes... Comment expli...